Le 18 juillet dernier, la Chine informait l’Organisation mondiale du commerce (OMC) de son intention d’interdire l’entrée sur son territoire à 24 catégories de déchets solides, dont certains plastiques, papiers et textiles. Effective depuis le 1er janvier, cette décision fait peser le risque d’un « scénario-catastrophe » pour l’environnement dans les pays riches… et met dans la panade sa propre industrie de la récupération.
Depuis le 1er janvier, la porte du géant asiatique est fermée à 24 catégories de déchets solides, dont certains plastiques, papiers et textiles, une mesure annoncée seulement six mois plus tôt par Pékin, qui avance des motifs écologiques. Cette nouvelle donne du marché planétaire des déchets s’avère problématique pour les industriels américains et européens, habitués à voir une Chine avide de matières premières absorber la majeure partie de leurs déchets pour les recycler, et qui disposent de très peu de temps pour se retourner. « C’est un séisme » et « on a toujours l’onde de choc. Cela a mis notre industrie en situation de stress car la Chine est tout simplement le premier marché mondial pour l’exportation de matières recyclables », se désole Arnaud Brunet, directeur du Bureau international du recyclage (BIR) basé à Bruxelles. L’Union européenne (UE) exporte la moitié de ses plastiques collectés et triés, dont 85% vers la Chine. Les Etats-Unis ont eux envoyé en 2016 en Chine plus de la moitié de leurs exportations de déchets de métaux non ferreux, papiers et plastiques, soit 16,2 millions de tonnes. »On va chercher des solutions alternatives, essayer d’identifier de nouveaux marchés de substitutions, à supposer qu’ils aient les capacités de traitement: on parle de l’Inde, du Pakistan ou du Cambodge », suggère M. Brunet. Mais cela pourrait prendre du temps: « Les capacités de traitement ne se déplacent pas comme ça du jour au lendemain », et dans l’immédiat l’accumulation des déchets, notamment en Europe, est « un risque majeur », prévient-il. L’interdiction de Pékin pose aussi un épineux problème aux entreprises chinoises du recyclage, extrêmement dépendantes des déchets occidentaux. « Cela va devenir difficile de travailler », admet Zhang Jinglian, propriétaire d’une société de traitement des déchets plastiques, Huizhou Qingchun. Plus de la moitié de sa « matière première » est importée et sa production va donc être réduite « d’au moins un tiers », explique-t-il à l’AFP, disant avoir dû récemment se séparer d’une dizaine d’employés. Les répercussions sont plus drastiques encore pour la société Nantong Heju, dans le Jiangsu (est): « Nous stoppons notre activité et cherchons désormais à nous reconvertir », confie un responsable à l’AFP.
Mais la décision chinoise pourrait à terme avoir pour effet positif de muscler les filières de retraitement. L’UE vient de dévoiler sa stratégie pour réduire l’utilisation des plastiques à usage unique, avec pour objectif que tous les emballages de ce type soient recyclables d’ici 2030. Seulement 30% des déchets plastiques des Européens sont recyclés à l’heure actuelle. Le reste finit incinéré pour produire de l’énergie (39%) ou en décharge (31%). »Nous devrions utiliser cette décision pour nous remettre en question et nous demander pourquoi nous, Européens, ne sommes pas capables de recycler nos propres déchets », argue le commissaire Frans Timmermans.